2022/65 Jour bleu, Aurélia Ringard. Frison Roche, 06/2021. 190 p. *****

         Attendre. Attendre quelqu’un sur un quai de gare. Occuper l’attente à des riens, observer les de passagers en transit, faire remonter des souvenirs… Quoi de plus banal ? Ce thème éculé est cependant traité dans Jour bleu avec une sensibilité et une originalité – à commencer par les circonstances qui ont mené Chloé à attendre au Train bleu garde de Lyon un passager qu’elle connait à peine. Petit-à-petit, elle nous dévoile sa rencontre avec ce photographe trois mois plus tôt, et cette promesse de se retrouver le 19 septembre à 13h17, sans savoir avec certitude si chacun sera au rendez-vous.

         Elle en a tant pris, des trains, pour passer d’une maison à l’autre avec son frère. Enfants de parents divorcés, enfants en transit dans des voyages hebdomadaires où elle sortait ses carnets pour faire ses devoirs. Histoire de passer le temps, et de ne pas avoir trop mal. Mais c’est fois, ce n’est pas elle qui voyage. Elle attend. Le temps s’étire, entre souvenirs d’enfance et interrogations sur ce pari des retrouvailles. Viendra-t-il, cet homme dont elle sait si peu de choses ? Viendra-t-il, celui qu’elle espère, celui qu’elle imagine, une main qui prendrait la sienne, un long baiser dans le creux de sa nuque. Les minutes s’égrènent, l’émotion monte doucement, et le désir aussi, retrouvé, impérieux. « Le désir est toujours tapi quelque part, prêt à bondir. Quand il surgit, nous voilà de nouveau frais et brillants, lavés de tout ce qui a pu nous abîmer, nous amoindrir, aptes à accueillir avec avidité le chapitre qui se présente. C'est étonnant, cette capacité à se renouveler. A faire table rase. » Aurélia Ringard a su, avec délicatesse, d’une plume précise et belle, nous prendre par la main et nous emmener avec Chloé, le souffle suspendu, après trois heures d’attente, jusqu’au quai numéro 7 où le train entre en gare. Une nouvelle histoire commence.

Un roman remarquable, qui mériterait largement d’être davantage présent sur les étals des libraires.

 

Roman lu dans le cadre des « 68 premières fois ».

 

Catégorie : Littérature française

attente / gare / train / coup de foudre /


Posté le 27/07/2022 à 12:09