Pactum Salis, Olivier Bourdeaut. Finitude, 2018. 253 p. 18,50 €

         Les marais salants de Batz-sur-Mer, dans la région bauloise. Les œillets que recouvre peu à peu une pellicule fragile et cassante – la fleur de sel, que récoltent les palétuviers, qui zigzaguent avec leurs brouettes entre chaque bassin. Au bout de l'un d'eux, une paire de pieds nus émergent, dont, à l'issue de la lecture de ce roman, je ne suis pas parvenue à identifier le propriétaire. Entre temps, le lecteur fait connaissance avec Michel, agent immobilier férocement enrichi, et Jean, palétuvier de son état. Ces deux-là se rencontrent au matin d'une nuit éthylique, le premier ayant complaisamment pissé sur la récolte du deuxième, lequel se venge en l'emballant encore endormi dans une bâche où il va cuire au soleil.

         Ces deux personnages vont nouer une amitié improbable, faite de cuites sévères et de duels verbaux, dans laquelle ils tentent surtout d'oublier leur solitude. L'humour est au rendez-vous, l'auteur met en scène, comme dans En attendant Bojangles, des personnages hors normes ou excessifs, comme Henry, le compagnon de chambrée de Jean pendant ses études vite avortées en droit, Henry issu de la noblesse déchue, qui cultive son inadaptation à la société et son alcoolisme avec une constance infaillible, mais je n'ai pas retrouvé la magie qui m'avait tant plu dans le précédent opus d'Olivier Bourbeaut. Les dialogues, pour parfois très drôles qu'ils puissent être, m'ont parfois paru artificiels – quel agent immobilier, tout fraîchement promu ouvrier palétuvier, dit à son nouveau patron : "Bien évidemment, je vous accompagne ! J'ai tant de péchés à expier. Je vais laver mon âme en transpirant et mon corps en le maltraitant. Si nous travaillons durement les dix prochaines heures, je pourrais peut-être gagner l'équivalent des hors d'œuvre d'hier soir." De même, la description des paysages – qu'on imagine sans peine superbes – m'a-t-elle semblé un peu ampoulée.

         Il est question d'alcool (beaucoup), de filles que l'on drague avec un succès relatif, d'amitié virile, d'efforts physique, d'argent aussi, dont Michel dispose visiblement sans compter, quand chaque brouettée pour Jean lui rapporte un salaire dérisoire, de bagarre, de disputes et de réconciliations, d'accident de voiture, d'un cadavre dans les marais et j'ai refermé ce roman plaisant mais un peu foutraque avec l'impression de n'avoir pas tout compris.

 

 

Catégorie : Littérature française

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Posté le 18/01/2019 à 14:25