De l'ardeur, Justine Augier. Actes Sud, 09/2017. 315 p. 21,80 €

         L'histoire de l'avocate syrienne activiste et défenseur des droits de l'homme Razan Zaitouneh, enlevée en décembre 2013. On suit Razan à ses débuts, lorsque refusée dans un cursus de journalisme elle entreprend des études de droit. Véritable passionaria, travaillant bénévolement ou presque, elle va accumuler une documentation quasi exhaustive sur les exactions commises par le régime de Bachar al-Assad.

         On sent sous la plume de l'auteur l'admiration que pouvait exercer cette femme, pour son engagement, sa force de travail, sa présence dans un monde, est-il besoin de le rappeler, presque exclusivement masculin. Nul doute que le combat de Razan Zaitouneh soit juste, et l'inquiétude suscitée par son arrestation depuis laquelle ses proches sont sans nouvelles. Mais le récit est déconcertant, dans ce qu'il mêle de convictions politiques et humanistes, et d'intime : l'auteur ne cache pas sa fascination pour le personnage, et évoque le fonctionnement d'un tribunal syrien, la lente mais inexorable fermentation des mouvements identitaires et extrémistes, ainsi que des éléments biographiques sur la vie quotidienne de Razan, son mariage, et même les tenues qu'elle porte et son air d'éternelle adolescente. Elle mêle également au récit des informations sur sa propre vie, n'hésitant pas à se mettre en situation d'enquêtrice en faisant part de ses sentiments pour Razan, ses appréciations sur son physique : "c'est assez beau ces paupières presque closes au-dessus des pommettes soulevées par le sourire" lorsqu'elle décrit une photo. A l'instar de l'avocate, qui écrivait des textes atypiques, entre le journalisme et l'essai littéraire, elle mélange l'intime et l'Histoire, l'empathie et le réel, dans un mélange des genres un peu dérangeant. Nul doute qu'elle ait voulu lui rendre un hommage fort, mais il confine parfois à une sorte d'hagiographie dont la confusion m'a souvent dérangée.

         Par ailleurs il y a, notamment dans les passages sur la réalité politique du pays, le choix d'une langue parfois complexe, et des effets de style qui, répétés, m'ont rendu la lecture indigeste, comme l'emploi de l'adverbe "toujours" en tête de phrase, à une place inhabituelle, qui donne à la phrase un effet ampoulé. Le livre, hélas, m'est tombé des mains p.98.

         Livre lu dans le cadre du Prix Littéraire des Lectrices de Elle édition 2018.

 

 

Catégorie : Divers

guerre / Syrie / politique / social /

Posté le 26/10/2017 à 17:44